LITHOTHERAPIE - EVEIL

Orgueil

Citations :

  • Prétendre être inférieur à l'inférieur, Égal à l'égal, Supérieur ou égal à l'inférieur, Cela est dit orgueil. (Nagarjuna)

  • "Ce n'est pas briller que de s'approuver soi-même." (Lao Tseu)

  • "Qui accumule en sa maison l'or et le jade n'en pourra défendre l'entrée. Qui tire orgueil de la richesse et des honneurs, tend l'échine aux calamités." (Lao-Tseu)


I) Processus de l'orgueil


Pour traiter ce sujet, je me base sur le Traité des divers degrés de l'humilité et de l'orgueil, écrit par le moine et Docteur Bernard de Clairvaux en 1127 (http://www.abbaye-saint-benoit.ch/saints/bernard/tome02/orgueil/orgueil02.htm).

Nous étudierons ainsi comment l'orgueil apparaît (1,2,3), comment agit l'orgueilleux en quête d'approbation (4,5,6), puis lorsqu'il n'obtient pas l'approbation des autres (7,8,9,10,11,12), au travers d'un exemple vécu.




1) la curiosité.

Au lieu de chercher à se connaître soi-même, d'être conscient de toutes nos pensées, émotions, perceptions, nous partons à la découverte de l'extérieur, de l'autre. Nous regardons au dehors au lieu de regarder à l'intérieur.

2) La comparaison (légèreté d'esprit)

Nous catégorisons les autres en supérieurs ou inférieurs et, à cette vue, nous oscillons entre souffrance et joie, avec un discours tantôt mélé de larmes, tantôt de rires. Des attitudes assez extrémistes.

3) La sotte joie

Pour éviter tout désagrément, nous évitons de regarder l'excellence des autres , expérience humiliante et nous ne portons notre regard que vers ce qui nous console, nous fait plaisir, à savoir ce en quoi nous sommes meilleurs qu'autrui. Nous n'oscillons plus entre la tristesse et le joie, il ne reste qu'une sotte joie, sotte car reposant sur un leurre : une vision partielle de la réalité. Il n'y a plus de mécontentement apparent, nous nous plaignons moins voire plus, ne versons pratiquement plus de larmes. Nous pouvons donner l'impression de nous élever spirituellement à quelques détails près : notre enjouement et notre vanité nous trahissent, l'un sur notre visage l'autre dans notre démarche. Nous nous sentons follement gais, plaisantons et rions facilement, mais nous nous mentons à nous-mêmes, nous ne voyons que ce qui nous arrange, ce qui nous confirme notre bonne image de nous. Nous ne nous connaissons donc pas réellement car, dans le cas contraire, nous ne serions pas surpris ni outrés par les critiques. En d'autres termes, nous voyons la paille dans l'oeil du voisin mais pas la poutre dans le nôtre.

Exemple : pendant un enseignement, un maître spirituel expliquait l'importance de générer de l'harmonie au sein de notre famille. Je ne me sentais pas du tout concernée, persuadée d'être une spécialiste de l'harmonie puisqu'elle règne entre mon mari et moi mais je voyais plusieurs personnes autour de moi que je connaissais suffisament pour savoir à quel point ce conseil les concernait.

4) La jactance

Nous avons plein de pensées qui ont besoin d'être traduites en paroles donc nous cherchons des interlocuteurs. Nous nous vantons par besoin d'être confirmé par les autres sur notre bonne opinion de nous-mêmes, pour étaler notre science et non pour aider ou instruire réellement. Capable de citer des enseignements mais sans en avoir la réalisation. Cela se reconnaît à un flot de paroles (intarrissable) et de bonne humeur, nous jugeons beaucoup. Nous séduisons les autres pour obtenir leur approbation.

Exemple : j'étais tellement sûre de moi que j'adoptais une posture très désinvolte, du genre : moi parfaite, pas concernée par tout ça. Je ne pouvais pas parler pendant l'enseignement mais la posture était très parlante. De plus, je me sentais très heureuse, forte de maîtriser la situation dans ce domaine. Bref, je crânais.

5) La singularité

Nous ne voulons pas être comme tout le monde, nous agissons différemment d'autrui, voulons paraître meilleur que les autres, ce qui nous faire remarquer et approuver des dupes. Nous donnons l'apparence d'être un bon pratiquant alors que seul, nous dormons ou rêvassons ou faisons peu de pratiques.

Exemple : ma position visait à me faire remarquer, pour que tout le monde comprenne que je maîtrisais le sujet contrairement à eux donc que j'étais différente d'eux.

6) L'arrogance

Nous sommes persuadés que nos idées sont les meilleures, que nous avons raison. Nous avons une opinion sur tout, nous mélons de tout. Nous trouvons que les compliments des "inférieurs" sont fondés, mérités. Nous méprisons les "inférieurs" et attendons une reconnaissance des supérieurs.

Exemple : mon attitude désinvolte montrait que je me croyais meilleure que les autres et c'est de l'arrogance : il n'existe pas d'instrument de mesure permettant de déclarer quel est le meilleur pour générer de l'harmonie.

7) La présomption

Nous croyons mériter la reconnaissance et sommes vexés si nous ne l'obtenons pas et c'est alors que nous pouvons tomber dans la médisance.

Exemple : Le lama m'a regardé droit dans les yeux alors que je me pavanais intérieurement avec mon attitude désinvolte. Quand il a repris la parole après la traduction, se fut pour dire qu'aucun de nous ne se sentait concerné alors que cela concernait chacun d'entre nous. Sur le moment, je me suis dit que les autres étaient gonflés de ne pas se sentir concernés.


8) La défense du péché

Même si nous reconnaissons notre médisance, nous la justifions en disant que la faute n'est pas grande, sans mauvaise intention ou en rejetant la responsabilité sur autrui.

Exemple : en y regardant de plus près, j'ai réalisé que je pouvais toujours faire mieux pour générer encore plus d'harmonie. Néanmoins, j'estimais que je n'avais pas beaucoup d'efforts à faire, qu'il y avait quand même déjà de l'harmonie. Que ce n'était pas si mal !

9) Un aveu qui n'est qu'une feinte

Citation : Il y a de la gloire à être humble; aussi l'orgueil même cherche-t-il à se couvrir du manteau de l'humilité pour échapper au mépris; mais la supercherie ne tarde point à être découverte par un supérieur, pour peu qu'il y ait excès dans cette orgueilleuse humilité, afin de mieux cacher la faute ou d'en éviter plus sûrement le châtiment. (Bernard de Clairvaux)

Quand nous ne pouvons plus cacher nos fautes, nous en faisons l'aveu car nous éprouvons de l'orgueil à manifester une attitude humble. Notre repentir n'est pas sincère et nous exagérons nos fautes, nous accablons tant et si bien que les autres finissent par douter de ce qu'ils nous reprochaient. Mais au plus léger mépris, au plus petit obstacle, nous ne pouvons plus feindre l'humilité, nous murmurons, nous irritons, nous crispons.

Exemple : je ne trouvais pas que mon comportement vis à vis de l'harmonie nécessitait beaucoup de changements mais je pris une position plus sérieuse et je m'évertuai à chercher des exemples de disharmonie et à les amplifier pour me donner l'illusion de faire un mea culpa.

10) La révolte

Nous devenons effrontés, impudents envers les supérieurs. Révolte exprimée et mépris envers les supérieurs.

Exemple : quand je suis passée devant le lama pour une bénédiction à la suite de cet enseignement, je ne le regardais pas car j'essaye de ne pas être dans l'attente d'un sourire mais il a attiré mon attention. Au moment où je l'ai regardé est monté en moi l'espoir que, malgré tout, son conseil sur la nécessité de générer de l'harmonie ne s'appliquait pas à moi. Et là, il a littéralement éclaté de rire ! Gloups !

11) La liberté de pécher

Nous sommes rejetés et nous rejetons les autres. Nous ne craignons plus nos supérieurs et ne cherchons plus le respect des autres, nous nous moquons de leur jugement et nous sentons libres d'agir comme bon nous semble même si nous ne le faisons pas encore. Nous commençons à nous détourner du chemin spirituel.

Exemple : Sur le moment, je n'ai pas compris pourquoi le lama riait. Je trouvais toujours que j'étais une championne de l'harmonie, quoi qu'il semble en penser, même si je voulais bien admettre qu'il est toujours possible de mieux faire.

12) L'habitude de pécher

Nous pensons toujours avoir raison et amplifions la tendance à l'orgueil. Nous nous abandonnons à nos tendances négatives et nous éloignons du chemin spirituel. Endurcissement et aveuglement nous caractérisent.

Exemple : j'ai passé plusieurs jours dans cet état d'esprit : une certaine assurance que je générais suffisament d'harmonie et que je ne voyais pas du tout ce que je pourrais faire de plus. Et plus je me confortais dans le fait que j'avais raison et moins je risquais de voir quoi que ce soit. Heureusement, ce lama écrit des messages sur son site internet de temps en temps et, quelques jours plus tard, il a posté un message parlant de l'espoir que nous cultivons d'avoir raison et qui nous emêche de voir clair. C'est à ce moment que j'ai enfin réalisé que j'avais un problème : un manque d'harmonie dans ma relation avec mon fils que je n'avais pas voulu reconnaître avant !


II) Répercutions de l'orgueil




a) Contradiction systématique

A l'extrème, l'orgueil peut nous amener à contredire systématiquement les autres pour occuper une position dominante.

b) Agacement des autres à notre égard

Notre pitié agace car elle nous pose en monsieur ou madame perfection qui considère les autres comme inférieurs.